L’art de questionner : un outil relationnel insoupçonné
BLR n° 51 – 12/06/2025
Questionner, ce n’est pas simplement chercher une réponse. C’est créer un espace, une réflexion, ouvrir une brèche dans le flux des automatismes, clarifier les priorités, structurer la pensée. C’est ouvrir une porte que l’autre n’avait pas encore vue. La qualité d’une question détermine la profondeur d’une prise de conscience, éclaire des angles morts, désamorce un non-dit, révèle une tension ou une intuition enfouie, dévoile des freins.
Pour les dirigeants, sur un sujet majeur, trouver la bonne question à se poser et à poser à ses équipes est un puissant outil de progrès. Cela suppose un renversement de posture : passer du réflexe de réponse à la posture d’écoute active. C’est aussi accepter de lâcher la position de sachant Un silence bien placé peut en dire plus qu’un conseil. Une reformulation juste peut apaiser une anxiété sans jamais avoir eu besoin de la nommer. Et si, au lieu de vous hâter de répondre, vous commenciez par redécouvrir l’art de demander ?
Qui ? Qui est vraiment concerné ? Qui décide, qui subit ? Qui influence ? Derrière une personne qui parle, y a-t-il d’autres acteurs invisibles ? Qui pourrait être impacté par cette décision ?
Quoi ? Quel est le cœur du problème ou de la demande ? Qu’est-ce que cette situation vient réveiller ? Qu’est-ce qui est réellement en jeu ? Quels sont les vrais défis à relever (pour l’entreprise, les équipes …) ? Qu’est-ce qui fait que c’est important pour vous ?
Quand ? Quel est le bon tempo ? Y a-t-il des échéances à ne pas manquer, ou au contraire un moment à attendre ? Depuis quand cela dure ? Et pourquoi maintenant ?
Comment ? Quels moyens ont déjà été envisagés ou testés ? Quelles solutions ont été rejetées ? Et pourquoi ?
Combien ? Quel est le poids (émotionnel, financier, réputationnel) du problème ? Quelle valeur la personne donne-t-elle à l’issue ? Combien cela vous coûte aujourd’hui – en temps, en énergie, en argent ?
Où ? Dans quel cadre ce problème se joue-t-il : entreprise, équipe, relation personnelle ? Où est-ce que ça bloque ? Où voudriez-vous en être ?
Pourquoi ? Est-ce si sensible — et si cela ne l’était pas, qu’est-ce que cela changerait ?
Ces questions, posées sans intention d’avoir « la » réponse, permettent souvent de sortir d’un conflit latent, de mieux comprendre une décision incomprise ou de recadrer un échange qui s’enlise.
Elles n’appartiennent ni au monde du droit, ni à celui du développement personnel. Elles relèvent tout simplement de l’intelligence relationnelle. Et dans un cabinet où les interactions sont permanentes, tendues, stratégiques ou politiques, elles deviennent un outil de pilotage aussi discret qu’efficace.
On croit souvent que la compétence relationnelle est innée, ou qu’elle se travaille en marge. Mais il est possible — et précieux — de l’éclairer, de la renforcer, de l’expérimenter.
Et parfois, tout commence par une seule question : « Et toi, qu’est-ce que tu en penses vraiment ? »
par Virginie Jubault, coach certifiée (CT Transformance) et associée, Avocom.
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