Géopolitique, le droit français, un influenceur ?
Article écrit par Philippe GOOSSENS, (photo de couverture) avocat associé ADVANT ALTANA.
Dès que les êtres humains ont été plus que deux sur terre, il leur a probablement été nécessaire d’inventer un mode de régulation de leur vie commune. Les gestes, la parole puis l’écriture ont été les vecteurs de la régulation et l’organisation de cette cohabitation.
La violence physique puis la puissance militaire ont été et restent encore malheureusement de nos jours, comme l’actualité nous le rappelle cruellement, un mode de rapports entre individus, groupes ou Etats.
Les croyances religieuses et leurs règles sociétales ont, quant à elles, longtemps gouverné les rapports entre les individus et exercé une influence notable sur les Etats.
Les avancées technologiques et culturelles ont et sont encore des instruments puissants d’influence et de « conquêtes non armées ».
Subtil mélange entre ces divers outils, la diplomatie constitue probablement l’art de savoir les combiner en fonction de leurs forces respectives afin de servir au mieux les intérêts défendus.
Dans un monde en profonde mutation, le droit est aujourd’hui un outil d’exercice de la puissance d’un Etat ou d’un continent.
Philippe Goossens
Dans un monde en profonde mutation, le droit est aujourd’hui un outil d’exercice de la puissance d’un Etat ou d’un continent.
Cette place essentielle du droit est renforcée par la montée en puissance d’opérateurs économiques concentrant en leurs mains des capacités technologiques et financières dépassant parfois celles de nombre d’Etats. Pas besoin ici de longs développements pour souligner la puissance des GAFA dans notre monde réel. Une puissance qui sera probablement décuplée dans ce monde virtuel en création dans lequel nos doubles informatiques évolueront, régulés par une règle de droit dont on peut légitimement se demander qui en sera le créateur et le garant.
Cette place essentielle du droit est renforcée par la montée en puissance d’opérateurs économiques concentrant en leurs mains des capacités technologiques et financières dépassant parfois celles de nombre d’Etats
Philippe Goossens
Mais c’est bien dans notre monde réel que les trois grandes puissances actuelles que sont l’Amérique du Nord, l’Europe et la Chine cherchent à affirmer leur suprématie et leur influence en partie par le droit.
L’Europe, par son histoire et les valeurs qu’elle défend, peut et doit jouer sa partie sur le plan international en imposant son droit au-delà de ses frontières géographiques qui, si elles ont une importance, perdent toute signification sur certains sujets à l’heure du numérique, des contrats internationaux, des cryptomonnaies et du métavers.
Affirmer que le droit est une clef de la compétition géopolitique mondiale relève de l’évidence, comme la mise en place du FCPA américain et les nouvelles routes de la soie chinoises en témoignent.
Philippe Goossens
Affirmer que le droit est une clef de la compétition géopolitique mondiale relève de l’évidence, comme la mise en place du FCPA américain et les nouvelles routes de la soie chinoises en témoignent.
L’Europe elle aussi doit jouer sa carte. La mise en place d’un « FCPA européen » puissant applicable aux sociétés étrangères, quelle que soit leur taille, s’impose. Notre législation française dite Sapin 2, même si elle constitue un premier pas, demeure insuffisante sur ce point.
Une régulation environnementale s’appliquant au-delà de nos frontières doit se mettre en place car une forêt qui brûle en Amazonie a ou aura, on le sait, un impact à terme en Europe.
Certes, le caractère régalien du droit, notamment répressif, rend à ce jour cette construction complexe à l’échelon européen, même si certaines initiatives sont prises en ce sens comme la création d’un parquet européen.
L’absence de structuration fédérale de notre continent ne permet en effet pas d’atteindre une efficacité équivalente à celle des Etats-Unis. Mais dans cette attente, la France a un rôle majeur à jouer en étant à la pointe de cette construction juridique et judiciaire nouvelle.
Il est du devoir des praticiens du droit…
Philippe Goossens
Il est du devoir des praticiens du droit comme des pouvoirs publics de prendre mieux en compte la place du droit comme outil d’influence et de rayonnement de l’Europe.
Philippe Goossens est avocat au barreau de Paris depuis 1995.
Il a débuté son exercice professionnel au sein du cabinet français Rambaud Martel, dont il a été associé en 2002, pour ensuite rejoindre le cabinet américain Proskauer Rose dont il a été associé de 2005 à 2009.
Au sein du cabinet Advant Altana dont il est associé depuis sa création, Philippe anime une équipe, de six avocats dédiés à la pratique du droit pénal des affaires.
Philippe et son équipe sont reconnus par les principaux guides nationaux et internationaux (Chambers, Legal 500, le Point, Le Monde du Droit, Décideurs…). Proches de leurs clients, ils les conseillent et les accompagnent tant dans la prévention des crises que lorsqu’elles éclatent. Ils leur apportent des réponses simples et opérationnelles à des questions souvent complexes.