GACS 2025 : I. Jegouzo livre les lignes stratégiques de l’AFA au GACS 2025 qui fêtait ses 10 ans
BLR n° 49 – 17/04/2025
Image de couverture : Isabelle Jégouzo, directrice de l’Agence Française Anticorruption (AFA) avec Nicolette Kost de Sèvres, associée, global co-head of global compliance & investigations, McDermott Will & Emery.
La 10e édition du Global Anticorruption & Compliance Summit (GACS) s’est tenue le 10 avril 2025 à Paris, confirmant son statut d’événement incontournable pour les acteurs de la compliance et de la lutte contre la corruption avec plus de 400 inscrits. Cette journée a été riche en débats et réflexions, animée par plus de 60 intervenants de haut niveau.
Un carrefour d’expertise et d’innovation
Cette dixième édition du GACS a démontré sa capacité à réunir l’ensemble des acteurs clés du secteur pour identifier les meilleures pratiques et relever les défis contemporains de la compliance. La diversité des intervenants, provenant tant du secteur privé que public, a permis d’aborder les sujets sous des angles complémentaires et parfois inattendus.
Les discussions ont particulièrement mis en lumière l’évolution du paysage réglementaire international, les tensions géopolitiques affectant la compliance, et l’émergence de nouvelles technologies comme l’IA dans les processus d’enquête et de conformité.
À l’heure où les enjeux de transparence et d’éthique deviennent centraux pour les entreprises et les institutions, le GACS s’affirme comme un forum essentiel pour anticiper les tendances et partager les solutions innovantes permettant de conjuguer performance économique et intégrité.
La richesse des échanges de cette édition anniversaire laisse présager un avenir prometteur pour ce rendez-vous annuel, devenu référence dans son domaine.
Un programme dense et diversifié
La journée s’est structurée autour de 11 tables rondes, une séance plénière et deux interventions spéciales (key notes), permettant d’aborder les problématiques les plus actuelles du secteur. La force de ce sommet réside dans sa capacité à réunir des professionnels d’horizons variés, dont la complémentarité a considérablement enrichi les échanges.

La matinée a débuté avec des discussions clés sur les enquêtes internes et leurs implications pour les entreprises, suivies par une analyse de la pénalisation croissante des affaires à l’échelle mondiale et ses conséquences pour les dirigeants
La matinée a débuté avec des discussions clés sur les enquêtes internes et leurs implications pour les entreprises, suivies par une analyse de la pénalisation croissante des affaires à l’échelle mondiale et ses conséquences pour les dirigeants. Les participants ont ensuite exploré la gestion des sanctions internationales dans un contexte d’incertitude, l’intégration des alertes dans les stratégies anticorruption, et l’apport des intelligences artificielles dans les enquêtes.

Le point culminant de la matinée fut la séance plénière questionnant l’avenir de « l’Europe de la compliance » face aux politiques extérieures américaine et chinoise, et l’évolution potentielle vers une régulation à géométrie variable.

l’avenir de « l’Europe de la compliance » face aux politiques extérieures américaine et chinoise, et l’évolution potentielle vers une régulation à géométrie variable.
L’après-midi a démarré par une key note sur les défis réglementaires américains sous la nouvelle administration Trump, suivie de tables rondes sur les enjeux de probité pour les acteurs publics, la gestion des contentieux dans l’opinion publique, et les conflits d’intérêts entre personnes morales et dirigeants.
Les dernières discussions ont porté sur la sécurisation des opérations de fusion-acquisition, les risques judiciaires liés aux diverses formes de « washing » (greenwashing, socialwashing, etc.), et l’impact de la suspension du Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) sur les entreprises eropéennes. La journée s’est conclue par une présentation des priorités de l’Agence française anticorruption.
L’AFA renforce son action et cible de nouveaux secteurs à risque
Retour sur la keynote au cours de laquelle Isabelle Jégouzo, directrice de l’Agence Française Anticorruption (AFA), et Nicolette Kost de Sèvres, associée, global co-head of global compliance & investigations, McDermott Will & Emery ont échangé sur les priorités et les nouvelles orientations stratégiques de l’agence.

L’Agence Française Anticorruption (AFA) a présenté ses priorités pour 2025 en clôture de la journée. Face à un contexte mondial en mutation, l’agence adapte sa stratégie tout en maintenant sa double mission de conseil et de contrôle qui fait sa particularité.

Face à un contexte mondial en mutation, l’agence adapte sa stratégie tout en maintenant sa double mission de conseil et de contrôle qui fait sa particularité.
Huit ans après sa création, le bilan est significatif : 165 entreprises et 110 acteurs publics contrôlés, offrant une vision concrète des pratiques sur le terrain. Cette expérience permet aujourd’hui à l’AFA d’accompagner efficacement les acteurs économiques dans un environnement juridique devenu plus souple et diversifié.
Une relation de confiance établie
La démarche de l’AFA repose sur un dialogue ouvert avec les entreprises. L’agence est très sollicitée par les acteurs économiques qui y trouvent un réel intérêt. Cette confiance mutuelle permet de maintenir l’équilibre subtil entre contrôle et conseil, deux fonctions distinctes mais complémentaires au sein de l’agence.
Un principe fondamental a été réaffirmé : lorsqu’une entreprise consulte l’AFA dans le cadre d’un guide ou d’une activité de conseil, les informations échangées ne sont jamais utilisées contre elle lors d’un contrôle ultérieur. Cette séparation garantit l’efficacité du dispositif et favorise la transparence.

lorsqu’une entreprise consulte l’AFA dans le cadre d’un guide ou d’une activité de conseil, les informations échangées ne sont jamais utilisées contre elle lors d’un contrôle ultérieur. Cette séparation garantit l’efficacité du dispositif et favorise la transparence.
Nouveaux risques, nouvelles priorités
L’AFA s’adapte aux menaces émergentes, notamment celles liées à la criminalité organisée. Pour 2025, le secteur de la santé a été identifiés comme prioritaire, après d’autres vagues telles que le BTP.
Le choix du secteur de la santé s’explique par sa complexité : il implique à la fois des acteurs publics et privés, mobilise d’importantes ressources financières, et fait l’objet d’une attente sociétale forte. C’est un domaine sensible où la bonne utilisation de l’argent public doit être garantie.

innovation cette année : les secteurs ciblés sont désormais annoncés à l’avance. L’objectif affiché n’est pas de piéger les entreprises, mais de les inciter à renforcer leurs dispositifs en amont.
Innovation cette année : les secteurs ciblés sont désormais annoncés à l’avance. L’objectif affiché n’est pas de piéger les entreprises, mais de les inciter à renforcer leurs dispositifs en amont.
Simplification des contrôles en vue

Face aux questions récurrentes sur le questionnaire initial adressé à l’ouverture des contrôles, l’agence envisage des ajustements. Une simplification de certaines questions est prévue, tout en conservant l’utilité préventive de cet outil que beaucoup d’entreprises utilisent désormais pour structurer leur dispositif de conformité. Les contrôles débouchent systématiquement sur un plan d’action et, souvent, sur un rendez-vous à six mois ou un an pour évaluer les progrès réalisés. Une approche qui vise autant à évaluer qu’à mettre en mouvement les acteurs concernés.
Reprise du plan national anticorruption
Ralenti par l’instabilité gouvernementale de 2024, le plan national de lutte contre la corruption devrait être adopté avant l’été 2025. Les équipes travaillent à clarifier les priorités et à proposer une version plus structurée et lisible.
Ce plan répond notamment aux préoccupations révélées par le baromètre de perception de la corruption, qui montre que 70% des Français pensent qu’il existe une forte corruption dans le pays. Ce chiffre, même s’il reflète une perception et non nécessairement la réalité, a un impact direct sur la confiance dans les institutions publiques.
Avec ses 800 alertes traitées en 2024 et déjà plus de 500 début 2025, l’AFA confirme son rôle croissant d’autorité externe d’alerte depuis la loi Waserman. À l’heure où la France cherche à renforcer son image sur la scène internationale, l’agence s’impose comme un acteur clé de la prévention et de la lutte contre la corruption.
NB : Cet article n’aurait pu voir le jour sans les contributions précieuses de Candice Zimmermann, directrice juridique et conformité, co-responsable de la commission managers juridiques (AFJE) et de Coline Fortuna, étudiante à l’École de Guerre Économique, en Master 2 Stratégie et Intelligence Juridique.

Créés en 2008, les Business & Legal Forums ont pour ambition d’accompagner les dirigeants des entreprises, les représentants des pouvoirs publics, des ONG et des conseils souhaitant réfléchir, identifier et « benchmarker » leurs pratiques professionnelles pour tendre vers toujours plus d’éthique et de performance. Avec plus 6 000 participants et 400 tables rondes à son actif, les Business & Legal Forums invitent à explorer le champ des possibles. Tout savoir et participer aux prochaines rencontres