Kiril Bougartchev, ténor du barreau.

BLR n° 43 – 14/10/2024

Photo de couverture : Kiril Bougartchev.

temps de lecture 3 minutes

Kiril Bougartchev, avocat à la cour, est un acteur renommé du contentieux des affaires. Il a cofondé, avec Emmanuel Moyne, le cabinet Bougartchev Moyne Associés en janvier 2017. Constitué d’une vingtaine d’avocats et juristes, le cabinet conseille ses clients dans l’ensemble des litiges auxquels ils font face que ce soit en droit pénal des affaires, en droit civil et commercial ou en matière réglementaire. Il les assiste également dans la conduite de leurs enquêtes internes, dans la mise en œuvre de leurs programmes de conformité et dans leurs due diligence anti-corruption.

Votre job description.

Avocat et chef d’entreprise. J’ai eu la chance de diriger les départements contentieux et pénal des affaires que ce soit chez Gide ou Linklaters, où j’ai par ailleurs piloté l’équipe « white collar » à l’échelle mondiale. Mon rôle principal était de veiller à ce que les gens collaborent efficacement, en favorisant les échanges entre les différents pays pour enrichir les pratiques de chacun.

Chez Linklaters, j’ai piloté l’équipe « white collar » à l’échelle mondiale. Mon rôle principal était de veiller à ce que les gens collaborent efficacement, en favorisant les échanges entre les différents pays pour enrichir les pratiques de chacun. Aujourd’hui, mon quotidien a changé. Avec une vingtaine de personnes, nous avons créé notre propre marque. .

Aujourd’hui, mon quotidien a changé. Avec une vingtaine de personnes, nous avons créé notre propre marque. Nos journées commencent tôt, avec la lecture de la presse et les échanges avec nos clients pour identifier les sujets sur lesquels nous pouvons les aider. Avec mes associés, nous répartissons les dossiers en fonction des compétences de chacun et veillons à un bon équilibre du travail entre les collaborateurs. Il est, à ce titre, essentiel pour nous de prendre le temps d’écouter les membres de l’équipe, d’être attentifs à leurs attentes. Les associés consacrent beaucoup de temps à la définition des axes stratégiques du cabinet : optimiser le portefeuille clients, choisir les bons dossiers et identifier les insuffisances potentielles entachant notre expertise pour y remédier. Nous élaborons également une politique de communication réfléchie et veillons à être présents aux événements incontournables de notre secteur.

Vos plus grands défis.

En tant qu’entrepreneurs, l’un de nos plus grands défis est d’imposer le cabinet sur un marché déjà mûr et de soigner l’image de notre marque. Cela est plus facile quand on peut compter sur des clients fidèles, sans lesquels cette aventure n’aurait pas été possible. Cette notoriété individuelle, que nous construisons jour après jour, doit avant tout profiter au cabinet pris dans son ensemble.

Cette notoriété individuelle, que nous construisons jour après jour, doit avant tout profiter au cabinet pris dans son ensemble.

Nous mettons en jeu notre sécurité financière mais c’est le prix à payer pour la liberté d’action. Ma plus grande satisfaction réside dans le fait d’être maître de mon destin : choisir les dossiers, ne plus subir des conflits d’intérêts commerciaux permanents, déterminer notre stratégie de développement et, surtout, choisir les équipes avec lesquelles je souhaite travailler. Cette indépendance est fondamentale.

Pourquoi avez-vous choisi le droit ?

J’ai suivi un parcours académique hybride : j’ai étudié le droit, la comptabilité et la finance. Aux Etats-Unis, j’ai travaillé sur les marchés boursiers pour une charge d’agents de change. C’est là que j’ai croisé des avocats américains alors associés chez Coudert Brothers qui m’ont offert un stage. Ensuite, j’ai passé six mois chez Arthur Andersen, en audit, avant d’effectuer mon pré-stage chez Jean Veil. Bref, j’ai exploré les trois secteurs qui me tentaient.

Aux Etats-Unis, j’ai travaillé sur les marchés boursiers (…) Mais au bout du compte, j’ai vite compris que regarder des écrans Reuters pour s’enrichir n’était pas mon objectif (…) C’est donc parmi les avocats que je souhaitais évoluer, avec ce subtil usage du cerveau et du cœur.

Mais au bout du compte, j’ai vite compris que regarder des écrans Reuters pour s’enrichir n’était pas mon objectif ou que les revues documentaires sans accès aux clients n’étaient guère épanouissantes. Le droit, en revanche, me captivait. C’est un métier technique, qui englobe une touche humaine essentielle. C’est donc parmi les avocats que je souhaitais évoluer, avec ce subtil usage du cerveau et du cœur.

Quels enjeux d’avenir pour votre profession ?

L’IA en tout premier lieu. Elle ne s’imposera peut-être pas immédiatement dans le contentieux, où chaque dossier nécessite de réécrire l’histoire. Cependant, il ne faut pas sous-estimer les risques qu’elle représente pour notre profession. Notre valeur ajoutée doit pouvoir perdurer. Nous devons apprendre à maîtriser et utiliser l’outil mais aucun logiciel ne pourra aller négocier directement avec un magistrat une CRPC ou une CJIP. Dit autrement, soit la machine nous remplacera, soit elle nous rendra plus efficaces et compétitifs, notamment dans l’automatisation de certaines tâches, comme les analyses de masses documentaires. C’est à nous de la dompter pour continuer à exister.

Dit autrement, soit la machine (l’IA, ndlr) nous remplacera, soit elle nous rendra plus efficaces et compétitifs, notamment dans l’automatisation de certaines tâches.

Un autre enjeu majeur, bien qu’il ne soit pas nouveau, est la mondialisation. Elle impose une formation continue pour maîtriser le droit comparé, en s’appuyant sur un réseau de confrères compétents à l’échelle mondiale.

Les qualités essentielles d’un avocat.

La force de travail, la réactivité, l’inventivité, l’opiniâtreté et le sens de la stratégie.

Les qualités essentielles d’un juriste d’entreprise.

Les mêmes mais dédiées à un seul client. La grande difficulté doit sans doute d’être capable d’indépendance d’esprit en étant étroitement lié à un client unique.

Les profils idéaux pour bosser avec vous.

Des avocats pour lesquels travailler est un plaisir. Nous aimons les fins juristes dotés d’une force de conviction, avec une double formation et maitrisant l’anglais ou une autre langue étrangère en plus du français. Et bien sûr, nous les souhaitons humainement sympathiques.

Trois personnalités que vous aimeriez embaucher pour compléter votre équipe (célèbres ou pas, fictives ou pas, vivantes ou pas)

Georges Pompidou parce qu’il ne désirait pas que l’on casse les pieds des Français, parce qu’il a fait Beaubourg, parce que c’était un homme bon.

Coluche parce qu’il était provocateur et parce qu’il s’autorisait des choses qu’on ne peut plus dire.

Joséphine Baker pour les paillettes, la chanson, les années folles, l’élégance et l’insouciance qui nous manque.

Qu’est-ce que vous aimeriez faire différemment dans votre quotidien ?

Ne pas fumer.

Quel autre métier auriez-vous fait si vous n’aviez pas été avocat ?

Un métier en lien avec le « beau » : commissaire-priseur ou diamantaire ou encore architecte.

Le livre que vous auriez aimé écrire. Le livre que vous lisez actuellement.

Le livre que j’aurais aimé écrire est sans doute « L’inespérée » de Christian Bobin, un recueil de nouvelles qui porte bien son nom notamment lorsque la femme qui entre dans votre vie est exceptionnelle. « Quelques étoiles s’approchaient et je devinais dans leur clarté un peu de votre âme disparue – frivole et gaie, inoubliable. » Je lis en ce moment deux livres. « Pêcheur de perles » d’Alain Finkielkraut et « Notes sur l’affaire Dominici » de Jean Giono. « Je ne dis pas que Gaston Dominici n’est pas coupable, je dis qu’on ne m’a pas prouvé qu’il l’était ».

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