Vigilance : l’UE durcit ses règles

Comment s’y préparer ? Comment limiter les risques ?

BLR n°26 – 16/02/2023

Photo de couverture : Table ronde du Business & Legal Forums le 20 octobre 2022 avec (de gauche à droite) Jean-Marie Gauvain, Casino, Alice Navarro, Agence française anticorruption, Emmanuel Rollin, Colas, Philippe Portier, Jeantet Associés et Cyril Naudin, FTI Consulting.


Retour en quelques mots sur une table ronde du 14e Business & Legal Forum (20/10/2022)

Alors que les entreprises françaises assujetties sont enfin opérationnelles sur les obligations de la loi Sapin 2, le projet de directive UE sur le devoir de vigilance viendra prochainement modifier le périmètre d’action de nos entreprises.  Sur la base de la loi française sur le devoir de vigilance, de nouvelles obligations risquent d’impacter leur business model et leur compétitivité sur les marchés internationaux. Les seuils et les sanctions promettent d’être, à l’instar de la loi allemande, très dissuasifs. Comment appréhender globalement les risques et réduire les coûts ?

Philippe PORTIER, avocat associé, JEANTET ASSOCIES. « Depuis octobre, la commission a adopté le projet de directive. Quel en est le calendrier ? Peut-on s’attendre à des évolutions ? »

En février 2022, la Commission européenne a présenté sa proposition de directive sur le devoir de vigilance en matière de durabilité des entreprises (la proposition). Depuis cette date, celle-ci suit la procédure législative européenne ordinaire : elle devra être adoptée conjointement par le Parlement et le Conseil à l’issue d’un processus de négociation impliquant les Etats membres.

Le 1er décembre dernier, les 27 ministres de l’Industrie ont adopté une position commune

Le 1er décembre dernier, les 27 ministres de l’Industrie ont adopté une position commune (sinon unanime) sur la proposition que le Conseil portera dans les négociations avec la Commission et le Parlement en 2023. Le travail en commission de ce dernier est également en cours. Il est peu probable que ces négociations finales débutent avant l’été 2023. Elles amèneront des modifications significatives à la proposition, comme l’application progressive par seuils (exemple allemand), le traitement spécifique des établissements financiers, l’accroissement de la liste des secteurs à risques, la clarification du champ des due diligences (« chaîne d’activités ») ou l’alignement avec la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive)…. Pour autant, celles-ci ne semblent pas devoir remettre en cause des fondamentaux de la proposition.

Cyril NAUDIN, head of investigation & compliance, FTI CONSULTING. « Quelles sont les bonnes pratiques face aux multiples cartographies dans l’entreprise ? »

Le premier réflexe que l’on doit avoir avant le début de toute nouvelle cartographie (vigilance, corruption, par exemple) est d’identifier tous les exercices de cartographie qui existent déjà au sein de l’entreprise.

Il faut s’attacher à impliquer les parties prenantes pertinentes…

Il faut en effet se poser la question si la nouvelle cartographie envisagée s’inscrit dans un exercice déjà existant ou si elle doit être envisagée de façon autonome. Puis, il faut ensuite s’attacher à impliquer les parties prenantes pertinentes : Compliance, Juridique, Communication, Risques, Audit Interne. Qui a la responsabilité des sujets ? Quelle va être l’équipe projet ? Envisage-t-on d’externaliser tout ou partie de la cartographie ? Enfin, Il est essentiel de vérifier que la méthodologie envisagée s’inscrit dans celle habituellement appliquée au sein de l’entreprise. Ce point sera notamment important dans la phase d’évaluation des risques. Des différences de méthodes ou d’échelles d’évaluation non identifiées pourraient conduire à des évaluations erronées.

Jean-Marie GAUVAIN, directeur des risques et de la conformité, CASINO GUICHARD PERRACHON. « Quels seraient les impacts du devoir de vigilance européen sur vos cartographies des risques ? »

La loi sur le devoir de vigilance du 27 mars 2017 a instauré un dispositif destiné à responsabiliser les entreprises françaises au titre des atteintes graves qu’elles sont susceptibles de causer, du fait de leurs activités, à l’environnement, aux droits humains et à la santé. A ce titre, la loi impose notamment l’établissement d’une cartographie des risques destinée à leur identification, leur analyse et leur hiérarchisation. Des difficultés sont rapidement survenues à l’occasion de l’application de cette loi. En particulier en raison de l’imprécision des concepts que la loi mentionne : « atteintes graves », « mesures de vigilance raisonnable » « filiales directes et indirectes », « relations commerciales établies », « parties-prenantes de la société »), mais également du fait de l’absence d’un décret d’application, d’une autorité de contrôle…….

La proposition de directive sur le devoir de vigilance en matière de durabilité va évidemment impacter les obligations des entreprises assujetties mais dans une proportion inconnue sachant que le texte n’est pas stabilisé à date. Ce qui devrait figurer dans la directive : l’abaissement des seuils d’application et donc un accroissement des entreprises débitrices du devoir de vigilance mais également les entreprises étrangères remplissant certaines conditions ; l’insertion de définitions de concepts clés ; la désignation d’autorités nationales de contrôle chargées de vérifier le respect des nouvelles règles par les entreprises et de les sanctionner le cas échéant, ce qui n’existe actuellement pas au niveau national ; des dispositions sur le régime de responsabilité des entreprises.

Le projet de directive sur le devoir de vigilance a bien entendu vocation à évoluer et son caractère contraignant…

Le projet de directive sur le devoir de vigilance a bien entendu vocation à évoluer et son caractère contraignant – seuils, étendue des obligations – sera certainement révisé avant son adoption définitive. Il devra ensuite être transposé en droit interne. Pour conclure, cette proposition ne sera pas la seule à impacter les obligations des entreprises. Le projet de règlement européen relatif à la déforestation importée devrait également avoir des incidences significatives sur les obligations de nombreuses entreprises également assujetties au devoir de vigilance.


Rendez-vous le 06 avril 2023 pour le Global Anticorruption & Compliance Summit (GACS) et le 19 octobre 2023 pour le Business & Legal Forum.


Cette tribune est un extrait de l’une de nos tables rondes. Pour prendre connaissance de l’ensemble des travaux de nos tables rondes, participez à nos rencontres, elles sont particulièrement riches en retours d’expérience tant des entreprises que des autorités et des conseils. TOUT SAVOIR.


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