Christophe ROQUILLY, directeur, EDHEC AUGMENTED LAW INSTITUTE
Photo de couverture : Christophe ROQUILLY
BLR n°38 -03/04/2024
Pour la BLR, Virginie JUBAULT a posé ses questions à Christophe ROQUILLY.
« Un homme que j’aurais adoré avoir comme professeur et avec lequel j’aimerais un jour travailler sur un projet pour grandir à ses côtés. »
Biographie
Christophe Roquilly est professeur et doyen honoraire du corps professoral et de la recherche à l’EDHEC BUSINESS SCHOOL où il dirige l’EDHEC AUGMENTED LAW INSTITUTE. Il est également vice-président du CERCLE DE LA COMPLIANCE, membre du conseil scientifique de la revue Semaine Juridique Entreprise et Affaires (LEXISNEXIS) et membre du conseil scientifique des BUSINESS & LEGAL FORUMS.
En quoi consiste votre travail ?
Je dirige l’EDHEC AUGMENTED LAW INSTITUTE, un Think & Do Tank. L’institut est pionnier en matière de formation, recherche et innovation sur les thèmes liés à la transformation du droit et des métiers du droit. Nous proposons des solutions concrètes qui sont immédiatement testées sur le marché. Par ailleurs, je continue d’enseigner à l’EDHEC, dans différents programmes.
Quelles responsabilités ? Quels enjeux d’avenir ?
Ma responsabilité est multiforme. Je dirige une équipe de 11 personnes, chercheurs inclus. Je supervise la stratégie, le management, le BD, la conception, la création de contenu. Sur la partie BD, le marqueur de l’intérêt du marché du droit pour ce que l’on développe est très important. Ce qui l’intéresse représente une valeur concrète.
L’EDHEC AUGMENTED LAW INSTITUTE est une business unit de l’EDHEC BUSINESS SCHOOL qui est une association loi 1901. Notre gouvernance est menée par les parties prenantes. L’EDHEC n’est pas une société commerciale. Cependant, mon rôle est notamment de veiller à ce que les projets d’EDHEC ALI soient financés de manière autonome, générer des revenus, réinvestir, recruter. Nous sommes des acteurs de la transformation des métiers du droit. Notre enjeu est de créer de la valeur pour les directions juridiques, cabinets d’avocats, Legal Tech, etc.
Quelles sont les qualités essentielles d’un directeur d’un institut tel que le vôtre ?
Il faut avoir de la vision. Savoir où on veut aller. Être capable de se projeter sur une période longue, être adaptable, agile. Entrainer avec soi son équipe avec résilience et persévérance. Il faut sentir les bons coups, anticiper les mauvais, se remettre en cause quand cela ne marche pas. C’est important de savoir dire non et de l’expliquer. Je pense que c’est nécessaire de se tenir aux décisions que l’on prend.
Prendre le temps de la réflexion. Mais quand c’est décidé, c’est décidé. Avoir une bonne capacité de travail évidemment … Et faire confiance à son équipe sans tomber dans le control freak.
Quels sont les profils idéaux avec lesquels vous aimeriez travailler ?
Ceux de mon équipe. Ils sont diversifiés. J’ai le luxe de choisir avec qui je travaille. Chaque personne est au bon poste. Ils sont tous d’excellents experts et de belles personnes. Chacun se complète, se renforce et rencontrerait des difficultés sans interaction avec l’autre. J’aime l’idée de se construire avec les autres. Je m’entoure de personnes qui ont des compétences que je n’ai pas. Il faut surtout veiller à ne pas recruter ses clones. En revanche, nous partageons des valeurs communes.
Votre plus grande réussite ?
La prochaine ! Ce n’est pas ce qu’on a réussi qui m’intéresse, mais ce qu’on réussira demain. Demain est un levier puissant.
Votre plus grosse galère ?
J’avoue que mes galères ont toutes été relatives. Des difficultés, il y en a toujours. Il y a des moments plus compliqués que d’autres. Mais ils ont été très relatifs pour moi.
L’erreur que vous referiez ?
Aucune. La prise de risques engendre des erreurs. Bien sûr. Mais refaire la même erreur, c’est une grave erreur.
Qu’est-ce que vous aimeriez faire différemment dans votre vie quotidienne ?
Me ménager du temps pour pratiquer du sport. J’en ai fait beaucoup plus jeune. A quelque chose malheur est bon. Le Covid m’avait donné l’occasion d’avoir une discipline sportive.
Cela dit, il suffit de vouloir faire les choses. Je ne me donne pas le temps.
Quel autre métier auriez-vous fait ?
Il est trop tard pour que j’exerce certains métiers. Pour d’autres, il est encore temps !
Pénaliste : le métier amène à travailler sur soi. Il exige une capacité d’écoute, une résilience, comme un médecin. Il doit être dédié à son client et avoir la distance nécessaire.
Aurais-je eu la distanciation ad hoc, ce n’est pas sûr.
Joueur de foot professionnel : je n’avais pas le niveau. Inatteignable. Sa vie est beaucoup plus difficile que les gens ne le pensent. Peu d’élus. Beaucoup d’échecs. Sa carrière peut se stopper à chaque instant. J’apprécie la capacité à s’épanouir tout en étant un élément du collectif.
Scénariste : là, il n’est pas trop tard ! J’aime beaucoup écrire. Le temps me manque aujourd’hui. Travailler mon imaginaire autour de séries ou de polars.
L’appréciation professionnelle qui vous a marquée ?
« Tu m’as aidé à grandir et à donner le meilleur de moi-même. Tout en respectant qui je suis ». En tant qu’enseignant, j’aime aider chacun à faire de son mieux, découvrir sa vocation, donner le meilleur de soi-même, instaurer un respect réciproque. Et bien sûr, veiller à ne pas blesser.
Quels sont vos référents ?
Mon père. Un homme juste et fiable, parti de loin. A qui on pouvait faire confiance. Un meneur d’hommes avec des défauts dont il était conscient. Quelqu’un qui ne se prenait pas pour un autre. Et qui ne prenait pas les autres pour ce qu’ils n’étaient pas.
Le livre que vous auriez aimé écrire ?
L’Odyssée d’Homère. Voyager, au sens d’une aventure, se confronter à des choses extraordinaires. Le voyage intérieur aussi.
Le livre que vous lisez actuellement ?
« Les jaloux », de James Lee Burke. Un des plus grands auteurs américains encore vivants qui écrit des polars se déroulant principalement en Louisiane.
J’adore ! Il dessine des galeries de portraits avec tellement de talent. Des personnages pas totalement bons, avec leurs zones d’ombres … Les méchants sont très méchants !
La plume est poétique et mystique. Je visualise les ambiances, les odeurs, les paysages. C’est toute une plongée dans un univers, très prenant.
Votre film préféré ?
Un film que j’ai vu à plusieurs reprises. « Il était une fois en Amérique. » Histoire d’un pays, d’individus, de vies. Violent, nostalgique. Une bande son dont on se souvient, avec le talent d’Ennio Morricone.
La pire injure ?
Celle qui est faite à ma confiance et mon intelligence.